Figure majeure du mouvement de la peinture informelle.
Ladislas Kijno (né le 27 juin 1921 à Varsovie et mort le 27 novembre 2012 à Saint-Germain-en-Laye), est un peintre naturalisé français en 1929. Il s’installe en 1925 à Nœux-les-Mines, petite ville du Pas-de-Calais. Installé en région parisienne depuis la fin des années 1950, il a, au fil des décennies, multiplié les vaporisations en peinture et s’est imposé comme l’un des maîtres de la technique dite du froissage, puis, plus tard, celle de la toile froissée, donnant ainsi du relief à ces surfaces ; ce sera désormais là l’une des caractéristiques, une sorte de signature, dans l’œuvre de l’artiste.
Avant-gardiste dans l’utilisation des bombes aérosols, au point que certains le considèrent comme un des pères spirituels du street-art français.
Figure majeure du mouvement de la peinture informelle.
Hommage à Rimbaud et Louise Michel
Sa rencontre avec Louis Aragon et Francis Ponge en 1943 l’a également amené à beaucoup œuvrer en collaboration avec des poètes. D’innombrables hommages habitent ses créations : Nicolas de Staël, Nelson Mandela, Galilée puis Gagarine ; mais encore les combats aux côtés des peuples algériens ou vietnamiens, mais aussi Tahiti, la Chine, l’île de Pâques.
Kijno au Plateau d’Assy
Bientôt, Kijno, atteint de tuberculose, voit ses études compromises. De 1942 à 1954, il fera de longs et nombreux séjours en sanatorium, sur le plateau d’Assy en Haute-Savoie. Sollicité en tant qu’artiste et curiste, comme témoin de tous les malades passés par le plateau d’Assy. L’enjeu est de taille, il relève le défi et peint « La Cène » sa première grande composition, placée au-dessus de l’autel de la crypte.
Peinture à l’huile et fusain de 120×275 cm représentant Jésus et les apôtres (1949-1950)
En 1955, il brûle la totalité de ce qu’il a peint depuis deux ans (250 toiles) et part s’établir à Antibes. Son œuvre est dès lors placée sous le signe d’une exigence implacable.
En 1969, le combat pour Angela Davis inspire à Kijno une longue série de thématiques sur « La Femme Debout ».
Tous deux se lieront d’amitié et en 1975, elle viendra rendre visite à son ami dans sa maison à Saint-Germain-en-Laye
Dans les années 1990, il travaille à la rose du portail de Notre-Dame de la Treille de Lille. Elle sera achevée 9 ans plus tard …
Notre dame de la treille – face extérieure et intérieure de la rosace
Immense artiste, mondialement reconnu, présent dans les collections de nombreux musées internationaux, il a toujours conservé le contact avec proches et amis restés au pays et fera une donation de 30 tableaux et 7 dessins à la ville de son enfance. (en exposition permanente à Noeux) …
Hommage à Saint-Éxupéry – Exposé à l’école qu’il fréquentait étant enfant
Sa riche carrière ne peut pas tenir dans cette page. Si vous voulez redécouvrir Kijno, Nicole Secq, une de nos adhérente férue d’art contemporain, nous a écrit un superbe article de 12 pages dans notre bulletin de juin 2019.
Donation Kijno : Hôtel Communautaire de Nœux-les-Mines, 138 bis rue Léon Blum, (face au lac). Le site : Kijno – Noeux-les-Mines
La vie d’Édouard Pignon, enfant de Marles-les-Mines, a été longue (1905-1993), et sa production artistique abondante et diversifiée (peinture, sculpture, mosaïque). Fils d’une famille de mineurs syndiqués et combatifs, il rompt avec la fatalité qui veut qu’un fils de mineur devienne mineur en partant vivre à Paris en 1926. Il a pour objectif de devenir peintre, et, pour que son rêve devienne réalité, il doit accepter d’enchaîner des travaux pénibles et peu valorisants pendant plusieurs années. Le temps libre qui lui reste est bien utilisé. Il parfait sa pratique artistique en fréquentant les cours de l’école d’art Germain Pilon.
Pignon – autoportrait de jeunesse
Il côtoie assidûment les grandes œuvres du Musée du Louvre, et surtout, il s’inscrit à l’Université Ouvrière où il suit des cours de littérature, de philosophie et d’économie politique. En 1933, Pignon franchit un nouveau pas décisif : alors que depuis 1930 il adhère à la CGTU (Confédération Générale du Travail Unitaire), il prend sa carte au PCF (Parti Communiste Français). Le fils de mineur, nanti de son seul Certificat d’études primaires en partant de Marles-les-Mines, est à présent un homme riche du bagage intellectuel indispensable à l’artiste qu’il veut être. Il sait peindre, sait ce qu’il veut peindre et pourquoi il veut le peindre. Sa longue carrière se met en route.
L’œuvre de Pignon se déroule par « séries », longues d’une ou plusieurs années, parfois récurrentes et qui traitent toutes d’un sujet différent : Ostende, Les Mineurs ,L’Olivier, Les Combats de coqs, Les plongeurs, Les Rendez-vous d’Antibes, Les Hommes de la Terre, Haute Tension.
Ostende,
la voile rose (Ostende) – 1948
Les Mineurs,
Les deux mineurs – 1948Mineur aux yeux bleus – 1949-52
Les Combats de coqs,
Combat de coqs – 1960 – Musée Pompidou
A chaque fois, ces séries confrontent l’artiste à une problématique différente : par exemple la stylisation des formes dans « Ostende », l’intériorité des portraits dans « Les Mineurs », l’énergie explosive dans « Les combats de coqs », série pour laquelle il revient régulièrement à Marles faire des croquis dans un gallodrome.
Haute Tension,
Haute tension – 1954 – Musée Pompidou
Il est cependant une œuvre qui échappe au principe de la série. Il s’agit de «L’Ouvrier mort», tableau que Pignon peindra à 2 reprises, en 1932 et en 1952. Ce tableau fait resurgir un traumatisme ancien de l’artiste, témoin du coup de grisou de la Clarence, alors qu’il était âgé de 7 ans. L’ œuvre, par sa force et son silence intériorisé, revêt un caractère universel et intemporel. Cet ouvrier, détruit par la dureté de son travail, est de tous les pays et de tous les temps.
L’ouvrier mort – 1936
La préoccupation du monde ouvrier guide la vie et l’œuvre de Pignon. Il revendique l’appellation d’artiste engagé, mais refuse avec raison celle de peintre communiste. En effet, il résiste aux directives du PCF qui attend de lui qu’il se soumette aux consignes du Réalisme Socialiste qui n’admet des artistes communistes que des œuvres glorifiant la classe ouvrière.
Le meeting – 1934 – Musée Pompidou
Pignon est trop libre pour servir toute propagande, quelle qu’elle soit. A « contre-courant », il est à maintes fois critiqué par son propre parti qu’il quittera en 1980 après l’invasion de l’Afghanistan par les chars soviétiques. A contre-courant, il le sera aussi en peinture, puis qu’il restera à l’écart de tous les mouvements qui vont se développer au XXème siècle et résistera à la tentation de l’abstraction pour lui préférer une figuration qui lui est propre, à la ligne forte et aux couleurs puissantes.
l’ouvrier mort – 1952 _ centre Pompidou
Pignon meurt en 1993, laissant derrière lui une œuvre colossale, à l’image du travailleur acharné qu’il fut. Reconnu au plan national et international, il est une figure majeure de notre région.
Les Hommes de la Terre – 1981/84 – (tableau exposé à la mairie de Marles).
Le Peintre spirite, qui refusait de vendre ses toiles
Né dans la ville minière de Bruay-en-Artois (actuellement Bruay-la-Buissière) dans le Pas-de-Calais, fils de mineur, Victor Simon commence aussitôt a travailler à la mine dès l’âge de 12 ans. En 1926, il obtient un poste dans les services de comptabilité des mines, qu’il quitte en 1930 pour tenir un café-tabacs à Fouquières-lez-Lens
En 1933, il reçoit un premier message médiumnique. Cette voix l’amène à réaliser sa première toile monumentale, de deux mètres sur quatre, intitulée « Résurrection », qui fut exposée au Salon des Indépendantes de 1935. Il réalise dès 1937 la « Toile Judéo-Chrétienne ».
Victor Simon – devant sa toile « résurrection »
Il a alors 30 ans. Puis, il rencontra Augustin Lesage, qui vivait dans une ville voisin (Burbure). Comme Lesage, Victor Simon se met à peindre de grands tableaux aux motifs décoratifs et aux couleurs claires.
La Toile judéo-chrétienne, 1937, huile sur toile, 1,96 × 3,00 m
De 1933 à 1972, Victor Simon a peint des centaines de petites toiles et une dizaine de grandes, couvrant environ 80 m25. Elles sont toutes composées comme une page d’écriture, de haut en bas et de gauche à droite. Les couleurs sont posées selon un procédé proche du pointillisme, les gouttes de couleur pure dessinant des figures géométriques, des arabesques, des hiéroglyphes, parfois des figures humaines, et des symboles d’inspiration égyptienne, hindou, byzantine.
La Toile Bleue (mai 1943 – octobre 1944), 1,90m x 4.98m (10m²)
Souvent exposées, Victor Simon n’a jamais vendu ses toiles.
Cosmogonie – La Terre, (1955)
Victor Simon était avant tout un homme spirituel dont la médiumnité s‘extériorisait d’elle même par la peinture. Il s’appuie sur ses expériences personnelles pour réaliser ses compositions, où apparaissent des figures chrétiennes mêlées à des éléments d’autres religions, une sorte de syncrétisme religieux. Ses œuvres sont accompagnées par des ouvrages et des conférences sur le sujet du spiritisme, écrit et donné par Victor Simon lui-même.
la toile jaune (1970-1971)
Guérisseur et conseiller spirituel, il fonde en 1947 la revue Forces Spirituelles. Il occupe ensuite de nombreuses fonctions en rapport avec le spiritisme, notamment président du Cercle d’Études Psychiques d’Arras en 1949, président de la Fédération Spiritualiste du Nord et délégué de l’Union Spirite Française en 1954. En 1968.il revient s’installer à Arras où il réalise sa dernière grande toile, la « Toile Jaune », en 1971, cinq ans avant sa mort.
Augustin Lesage, né à Saint-Pierre-lez-Auchel en 1876, est simple mineur de fond à Ferfay. Il ne possède aucune connaissance en histoire de l’art, ni en pratique artistique. En 1911, alors qu’il est âgé de 35 ans, il entend des voix qui, du fond du boyau de mine où il travaille seul, lui disent : « N’aie crainte, nous sommes auprès de toi. Un jour tu seras peintre ». Après quelque temps d’interrogation, voire de frayeur, poussé par quelques amis eux-mêmes spirites, il s’initie au spiritisme. Ce courant de pensée très vivace dans les milieux miniers de Belgique et du Nord de la France est fondé sur la croyance en Dieu, en la réincarnation et en la communication avec l’au-delà.
Augustin Lesage en tenue de mineur
Il réalise alors ses premiers dessins sur papier tracés aux crayons de couleur. Les formes sont spiralées ou ondulées et le fond couvert de petits points plus ou moins serrés. Lesage affirme n’avoir aucune emprise sur ces dessins puisque sa main est guidée par l’esprit de Marie, sa sœur cadette morte à l’âge de 3 ans. Par la suite, il se dira guidé par Léonard de Vinci et Marius de Tyane, philosophe et faiseur de miracles au 1er siècle de notre ère.
Lesage – Sans titre – 1912 dessin sur papier. (35 x 52,1 cm)
Après la phase de dessins sur papier, obéissant à ses voix, il passe à la peinture à l’huile sur toile. En 1912 , il s’attaque à sa première grande œuvre : une immense toile de 3×3 mètres dont les étonnantes dimensions lui ont été dictées par les esprits. Sa réalisation lui demandera plus d’un an de travail exécuté après son travail à la mine et pendant ses jours de repos. Cette peinture, comme celles qui suivront, est peinte sans schéma préalable, en commençant par le coin supérieur droit et en procédant par accumulation de micro éléments peints en couleurs pures.
A partir de 1920, les tableaux de Lesage se reconnaissent à leur symétrie, leur organisation en bandes horizontales et à l’emploi de motifs décoratifs ou ésotériques tous abstraits.
Faute de hauteur sous plafond dans sa cuisine qui lui sert d’atelier, il doit rouler ou plier sa toile au fur et à mesure qu’il peint. Son travail avance donc sans qu’il puisse voir le tableau dans son entier.
Esprit de la pyramide – 1926 (293 x 200,5 cm)
En 1921, Lesage reçoit la visite de Jean Meyer, directeur de la Revue spirite et fondateur de l’Institut des spirites. Ce dernier voit immédiatement dans le « mineur-peintre » le héraut de la cause spirite. Il devient le mécène de Lesage qui cesse alors son activité de mineur en 1923 pour se consacrer à la peinture, mais aussi à de nombreuses expositions, conférences, sans oublier les voyages en Europe, en Afrique du Nord et en Egypte. Une partie de la vie de l’artiste se passe « en représentation». Ce n’est pas l’argent qui le motive mais la reconnaissance de son talent. A présent, il accède à un statut social auquel il a toujours aspiré.
Lesage en train de peindre en public
Un changement stylistique s’opère également pendant ce qu’il appelle » la deuxième phase de son apostolat ». Des formes rondes et ovales se mettent à bourgeonner, comme libérées des lignes horizontales de la période précédente. Des oiseaux, des visages envahissent la composition et les tons purs cèdent la place à des couleurs sourdes. Plus étonnant encore, des reproductions d’images égyptiennes, chrétiennes, hindoues, viennent, de façon plus ou moins heureuse, agrémenter les compositions. Peut-on encore parler de peinture spirite? Les détracteurs réclament des preuves scientifiques auxquelles Lesage se soumet parfois. Les conclusions ne sont pas toujours probantes !
Les Mystères de l’Antique Égypte – 1930 (143 x 113 cm)
Lorsqu’il meurt en 1954, il est sans doute le peintre spirite le plus connu et le plus exposé de son temps. Son œuvre imposante tient une place importante dans l’art brut et côtoie aussi l’art abstrait et le surréalisme. Protégé par le cocon spirite, ce curieux personnage qui se croyait la réincarnation d’un peintre hindou et d’un ouvrier des pyramides d’Égypte nous laisse une œuvre séduisante et énigmatique qui n’a pas fini de provoquer maints questionnements.
Palette décorée d’Augustin Lesage. Don à son ami Henri Descamps – 1944
Lien vers une page de l’INA, dans la série « Mémoire des mines », avec une vidéo de présentation : Reportage sur Augustin Lesage
René Ducourant est un peintre connu pour son travail réalisé durant des années pour l’église de Gosnay. Il est pourtant bien plus que ça. L’homme est réputé bien au-delà des frontières françaises pour ses marines et ses portraits. Il a aujourd’hui des toiles partout dans le monde et ne rêve plus que d’une chose, qu’elles soient exposées et appréciées chez lui.
Autodidacte, de renommée internationale, il a d’abord exercé le métier artisanal de Peintre en Lettres pour subvenir à ses besoins, tout en menant de front grâce à l’amour de son épouse Bernadette, de ses quatre fils et de la Peinture.
Le peintre dans son atelier
Unité d’Art Sacré
Pour célébrer le Grand Jubilé de l’an 2000 et le 2000ème anniversaire de la naissance du Christ, René Ducourant décide de consacrer plusieurs années de sa vie à la création d’un ensemble d’œuvres inspirées par sa foi. Il lance dès 1998, le projet de créer une Unité d’Art Sacré dans l’église de son village, Saint-Léger de Gosnay, en état de délabrement, 70 œuvres d’art, peintures, vitraux, sculptures, dont 22 tableaux sur le thème de la vie du Christ de l’annonciation, 10 vitraux (4 pour le cantique des cantiques et 4 pour le cantique du Magnificat), créées bénévolement et qu’il offre à Artois Com. L’Unité d’Art Sacré, créée par un seul artiste, est unique au nord de Paris.
Vitraux dans l’Unité d’Art Sacré de l’église Saint-Léger à Gosnay
Une unité d’art sacré, c’est un lieu entièrement investi par un artiste. René Ducourant a ainsi habillé l’église de Gosnay de ses œuvres, peintures et sculptures. Il a ainsi réalisé l’autel, mais il s’est aussi formé à l’art du vitrail, refaisant tous les vitraux de l’église avec deux thèmes : le Magnificat et le Cantique des cantiques.
Pont Aven
Attiré par Gauguin il découvre Pont-Aven, cette petite ville du Finistère surnommée la cité des peintres. « J’aimais beaucoup Gauguin. En 1984, on proposait aux peintres d’exposer pendant un mois pour 5 000 francs. J’ai envoyé des photos de mes œuvres et on a accepté de les exposer l’année suivante. Dès la première exposition, j’ai vendu dans le monde entier. » Une révélation pour l’artisan qui est devenu artiste.
Le succès est toujours au rendez-vous. En 1988, René Ducourant crée sa galerie « Ty Aven ». «Ça fait vingt-cinq ans que j’expose et que je vends là-bas». Mais maintenant, c’est un galeriste qui gère la galerie.
Marines
Fleurs
Quelques Cosmos et mes Dahlias
En 1966, René Ducourant expose pour la première fois à Béthune. Près de 53 ans après sa première expo, victime d’un AVC en 2017, il revient en 2019 fêter son jubilé à la chapelle Saint-Pry autour de ses œuvres, celles d’un peintre considéré de son vivant comme un des plus grands des Hauts-de-France.
Un clic sur l’image pour voir les photos de la cérémonie
Fils d’un mineur du bassin houiller de Béthune, il connait un début de vie difficile, adouci par de brillants succès scolaires et son attirance vers les arts.
A sa sortie des Arts et Métiers de Lille, il débute une carrière d’officier du Train puis s’oriente vers l’enseignement.
A partir de 1949, il s’adonne avec passion en tant qu’amateur à la peinture. En 1951 il s’installe sur la Côte d’azur, loin de sa famille qui lui manque. Commence alors un période d’intense création inspirée par la lumière et la douceur du sud.
Noirs (1951) – Des terrils du Nord aux soleils de la Riviera
Il va peindre sans relâche des portraits, des paysages, des œuvres délivrant un message, soit implicitement (comme la Chasse à courre) soit par un symbole (Noirs). Mais, en 1952, les aléas de la vie referment la lumineuse parenthèse et l’oblige à se consacrer uniquement à l’enseignement et à sa famille.
Guynemer (1951)
Vingt-huit tableaux en trois années. Elles seront les années de création de Daniel Blondeau où il peindra pratiquement toutes ses toiles dans des conditions matérielles difficiles, avec pour atelier à Tarbes un grenier étouffant l’été et glacial l’hiver, puis la chambre d’un hôtel meublé proche de son lycée à Cannes.
La Folie entrainant aux Horreurs de la Guerre
Sa signature : un cœur rouge brisé sous les valves. (Citation dans « Le Delarge, Dictionnaire des arts plastiques et contemporains »).
L’enfant à la colombe (1952)
Daniel Blondeau referma son échappée fulgurante dans le monde de l’Art en 1952. Se sentant incompris à l’époque dans sa manière symboliste de s’exprimer, il referma cette échappée pour se consacrer, avec une rare conscience professionnelle à son métier d’enseignant. Il ne s’était adonné à son art que pendant 3 ans. L’œuvre créative de Daniel Blondeau est une fulgurante et bouleversante parenthèse dans la vie d’un homme qui a su accepter en silence sa destinée. Il s’éteint en 1992.
L’appel du large
Aujourd’hui, l’École de l’air de Salon de Provence a accepté en 2010 le don du tableau « Guynemer » (1951). En 2017, deux de ses œuvres « La Folie entraînant aux horreurs de la guerre » (1951) et « L’enfant à la Colombe » (1952) sont entrées dans les collections du Musée La Contemporaine (ex BDIC), d’abord en l’Hôtel National des Invalides, depuis octobre 2021 à l’Université de Nanterre. Don en 2020 au Musée de Matsuyama (Japon) du ‘Portrait de la mère de l’artiste » exécuté au fusain.
Tiburce Auguste Louis Dégez, né le 3 août 1848 à Béthune, mort le 25 décembre 1933.
Architecte de la vile de Béthune, il débuta avec son père avec le démantèlement des fortifications de la ville.
Architecte départemental adjoint pour l’arrondissement de Béthune (à partir du 14 janvier 1885).
Architecte des coopératives de reconstruction de Béthune I, II et VIII[1].
Quelques-unes de ses réalisations :
Église de Festubert ; collège de jeunes filles et caisse d’épargne de Béthune ;
Caserne des sapeurs-pompiers de Béthune ;
Écoles de Auchel, Bruay, Carvin, Dourges, Harnes, Lillers, Pernes, Nœux-les-Mines.
Il œuvra auparavant au démantèlement des fortifications de Béthune.
Expert auprès des tribunaux.
Paul Albert Louis Dégez, né le 22 février 1890 à Béthune, fils de Tiburce Dégez, mort le 8 novembre 1966.
Architecte des monuments historiques, il assura la restauration du théâtre, du beffroi de Béthune, et d’une partie de la Grand-Place de la commune.
Architecte de l’arrondissement de Béthune ; architecte du secrétariat d’État à l’Instruction ; membre de la Commission des Bâtiments civils du Pas-de-Calais.
La reconstruction des régions détruites par la Guerre de 1914-1918 a attiré de nombreux architectes vers notre région et notamment la ville de Béthune.
Né à Bienne, au Nord de la Suisse non loin de la frontière française, en 1898 René Évard va faire ses études au Technicum de cette ville. Il obtient le diplôme d’ingénieur architecte, spécialiste du béton.
Il traverse la frontière en 1921 avec ses valises pour tenter sa chance à Béthune. Il a 23 ans.
Il lui faut se loger. Il choisit un hôtel en plein centre de la ville : « l’hôtel du Lion d’Or », 4 rue du collège (actuellement rue Henri Pad).
C’est le Café-Hôtel tenu par Monsieur Deweppe-Belval dont il va épouser la fille Aline en 1922.
Il participe alors à la reconstruction de Béthune et environs. Il y développe son talent et laisse de nombreux édifices caractérisés par un style où prédomine l’art déco.
René Évard est devenu rapidement un vrai béthunois. Il s’y fait de nombreux amis et participe activement à la vie de la cité.
C’est aussi un artiste reconnu qui ne cessera de peindre comme son ami architecte Léon Guthmann.
La Confrérie des Charitables de Béthune est très fière de l’avoir compté parmi ses membres.
En 1969, il décide de prendre sa retraite à Mandelieu où il décédera en 1985.
Son fils André Évard et plus tard son petit-fils Frédéric, architectes des Bâtiments de France, hériteront de son goût pour l’architecture.
Les réalisations de l’architecte :
René Évard va participer au concours pour l’édification du nouvel Hôtel de Ville de Béthune en 1925.
Il sera classé troisième dans cette compétition, derrière Decaux et Guthmann, Alleman ayant été gratifié d’une mention spéciale.
Une construction importante sera réalisée en 1928 par René Évard ;
Il s’agit d’un bâtiment qui réunira « la justice de Paix » et les « cours municipaux » situé à l’angle des rues Henri-Pad et Edouard-Herriot.
René Évard, va déployer son talent dans la construction de plusieurs maisons de commerce et d’habitation à Béthune.
Angle de l’avenue Jean-Jaurès et Aristide Briand.
Angle de la place Clemenceau et de la rue E- Zola : ancienne parfumerie devenue « Catimini »
Avenue de Washington : maison de M. Descamps (1939)
Gare des Cars Artésiens
Station-service (actuellement démolie), Route de Lille – Mont de Quinty
LE PEINTRE
Comme beaucoup de béthunois, Monsieur René Évard va suivre les cours de Peinture de Monsieur Caplier, peintre roubaisien. (auteur du tableau exposé à la Chambre des Charitables daté de 1935). Il va y rencontrer son confrère et ami Léon Guthmann.
Peinture de Rene-Evard
En outre, l’architecte préside aux destinées de la Société photographique de l’Artois.
René Évard-Deweppe est élu à la Confrérie des charitables en 1926. Il est nommé chéri bien aimé. Il reçoit la médaille d’argent de la Confrérie en 1928, la médaille de vermeil en 1939 pour services exceptionnel. Il vient en effet de dessiner et suivre les travaux du parc de Quinty en 1927. Mayeur en 1944, il est décoré de la médaille de l’encouragement au bien en 1947.
Qui était René Évard
René Évard, un Suisse devenu Béthunois, qui a su participer à la vie de Béthune, comprendre sa population, ses coutumes.
René Évard, l’architecte agréé laisse dans tous les coins de Béthune un témoignage de son talent, des immeubles imprégnés de l’art déco qui fait le charme de notre cité avec ses balcons, ses terrasses, ses vitraux, ses lignes géométriques.
René Évard méritait bien que soient évoqués son souvenir et les œuvres qu’il nous a confiées.
Léon Guthmann est né en 1885 à Limoges
Son grand père, originaire de Fessenheim, vient s’établir à Limoges dans les années 1840 et appartient par la suite à la gendarmerie impériale. Son père alors sous-ingénieur des Ponts et Chaussées sera ensuite muté à Périgueux avec le grade d’Ingénieur.
Léon fréquente le lycée de Périgueux où il obtient le baccalauréat section philosophie.
Un architecte de la ville lui recommande de suivre des cours d’architecture. Il entre à l’École des Beaux-arts à Paris où il fréquente l’Atelier de Victor Laloux, membre de l’Institut (architecte notamment du palais et de la Gare d’Orsay ainsi que de la Mairie de Roubaix). Il en sort en 1910 architecte « Diplômé par le Gouvernement» (DPLG).
Il y rencontre et se lie d’amitié avec Robert Largesse, fils d’un entrepreneur marbrier du Havre, qui suit la section sculpture dans la même école.
Il collabore au Cabinet d’architecture Dubois d’Auberville et participe à l’édification de l’Hôtel Lutétia à Paris. Il crée notamment le motif des guirlandes de roses qui ornent la façade de cet Hôtel et qu’il fera reproduire par son ami Largesse sur la façade de la maison qu’il fera réaliser à Béthune, rue Gambetta.
Léon Guthmann réussit un concours qui fera de lui l’architecte de la Préfecture de Police de Paris, fonction qu’il exercera jusqu’à la guerre 1914.
Il est alors affecté au 250éme Régiment d’Infanterie de Périgueux. Sous-lieutenant il sera blessé près de Bapaume à Moulin-sous-Touvent en septembre 1914.
Blessé à nouveau en 1915, il est «réformé partiel» et nommé instructeur de la classe 1916. C’est à Sens dans le Génie qu’il reçoit le grade de lieutenant.
La Paix revenue, il envisage de revenir à Périgueux. Mais il lui est conseillé de rejoindre le Nord qui est à reconstruire et notamment Béthune. A cette époque des sociétés coopératives de reconstruction sont créées. La plupart des architectes s’associent pour travailler pour ces sociétés.
Voilà Léon Guthmann qui s’installe au« château du Perroy » avec plusieurs confrères pour fonder le cabinet de Messieurs Alleman – Bocsanyi – Capelle – Gillon -Guthmann – Raynaud, architectes DPLG, agrées des communes.
Reçu à entête du cabinet
En 1921 un cabinet Alleman – Gillon – Guthmann est ouvert 13 Place Marmottan à Béthune. Dans cet immeuble de nombreux collaborateurs, dessinateurs travaillent autour des projets préparés par les architectes. Chaque architecte y développe le talent qui le caractérise.
Maison de l’architecte Léon Guthmann rue Gambetta
Léon Guthmann vers 1922 achète un terrain rue Gambetta et y construit sa maison qu’habitera ensuite le Docteur Georges Fruchart à partir de 1939.
L’examen des immeubles construits sur Béthune par Léon Guthmann démontre la variété des styles qu’il a su développer. Hors de Béthune, il reconstruit les églises de Hinges, St Venant, St Floris.
Ce sera un habitant bien intégré à Béthune. Il va aussi démontrer ses talents de peintre. Reconnu pour son sérieux, il sera très souvent désigné comme architecte expert par le Tribunal.
En 1937, il décide de rejoindre Périgueux où il va continuer à exercer ses talents d’architecte. Il sera notamment chargé par la ville de Périgueux de la construction d’un centre de vacances à Biarritz et pour cette réalisation il va demander à son ami architecte de Béthune Monsieur Evard de l’assister.
Il participe aussi après la deuxième guerre à la reconstruction du bourg de Rouffignac en Dordogne qui avait été incendié par les troupes allemandes.
C’est en 1975 que décède Léon Guthmann.
Les immeubles construits à Béthune :
Plusieurs immeubles ont été construits notamment dans le cadre de la reconstruction de Béthune par cet architecte.
Hôtel du vieux Beffroi – Grand Place
Immeuble Mlle Fournier, rue des Treilles
Immeuble Place Marmottan
La Maison de Maître Jules Appouchaux, rue des Treilles vers 1934
Les sculptures de son ami R. Largesse dans la rue Ludovic Boutleux
Reconstruction du collège St Vaast après l’incendie en 1936
Léon Guthmann et Mr Picquart entrepreneur avec ses ouvriers sur le toit du collège
Le clocher du collège St Vaast ayant subi de gros dégâts, Léon Guthmann a obtenu après de longues discussions, de le couvrir de plaques de cuivre qui lui donnent toujours cette couleur verte caractéristique.
L’expert auprès du tribunal
En raison de sa compétence en matière de construction, de son sérieux, de ses qualités morales, de son sens de la conciliation, il va être inscrit sur la liste des experts près de la Cour d’Appel de Douai et ainsi être très souvent choisi comme expert par les tribunaux jusqu’en 1937, date de son départ pour Périgueux.
L’artiste
Léon Guthmann est architecte mais aussi un artiste. Il apprécie la sculpture notamment celle de son ami Largesse, mais il passe surtout une partie de ses loisirs à peindre.
Il n’est pas le seul à Béthune à s’exercer à cet art, son confrère architecte René Evard, le marbrier Adolphe Clipet, Helion le décorateur et marchand de meubles établi sur la grand place, suivent avec d’autres des cours dispensés par un artiste de Lille Achille Capliez. Guthmann, Evard et Helion seront admis au salon des Artistes Français et participeront à de nombreuses expositions sur la région.
Reproductions de quelques tableaux peints par Léon Guthmann
La vie sociale
Les relations de Léon Guthmann ne se limitaient pas aux seuls amateurs de peinture. Avec son épouse et ses deux enfants, la famille Guthmann s’est vite intégrée à Béthune notamment avec ses voisins de la rue Gambetta et les béthunois du monde de la construction des affaires et des arts.
Il se lia d’amitié avec le chanoine Campagne, supérieur de l’institution St Vaast, ancien combattant valeureux de la guerre 1914 1918. Dès 1930 il possède une caméra et filme la Confrérie des Charitables lors des funérailles de l’archiprêtre de Béthune le Chanoine Pruvost.
C’est là qu’il côtoyait notamment Jules Appourchaux Député du Pas de Calais et sa famille pour qui il construira la maison de la rue des Treilles et de nombreuses familles de Béthune en villégiature.
Ce modeste article se veut un hommage rendu à un architecte qui a participé à cette belle aventure de la reconstruction de notre ville et qui a marqué de son talent la qualité de notre environnement qui fait l’attrait de notre cité.
Parmi les architectes de la reconstruction, Jacques Alleman tient une place essentielle. Comme la plupart de ses confrères, il est étranger à notre ville. Il nous vient en 1919 de Bordeaux où il a vu le jour en 1882. Il y passe sa jeunesse dans le magnifique cadre de la place de la Bourse dont il restera imprégné. Son père y tient un commerce de bouchons pour les négociants bordelais du quartier des Chartrons.
Bordeaux – place de la bourse
Il vit dans une famille cultivée. Le grand oncle Jean François Blade, était le spécialiste de la collecte des traditions orales de la Gascogne. Sa jeune sœur Jeanne Marie décédée en 1938, était l’auteur de plusieurs romans qu’elle publiait sous le pseudonyme de son ancêtre Jean Blade.
Jacques Alleman pratique le dessin avec beaucoup de finesse et d’imagination. Il va fréquenter l’École des Beaux-Arts de Paris qui formait les architectes pouvant porter en fin d’études le titre de DPLG (diplômé par le Gouvernement). C’était l’époque où le titre d’architecte n’était pas réglementé. Les autres architectes portaient le nom « architecte agréé » . . . Il faudra attendre 1977 pour qu’une loi intervienne pour réglementer l’usage du titre.
Jacques Alleman finit ses études en 1909. Il va, dans un premier temps, s’installer à Lausanne sans que l’on puisse retrouver les traces du travail qu’il a pu alors y accomplir.
Puis vient la guerre de 1914-1918. Le sergent Alleman va servir dans le 418e Régiment d’Infanterie. Il va combattre à Ypres, Neuville-Saint-Vaast, Verdun dans la Somme et l’Aisne. Il reçoit la croix de guerre et diverses médailles pour honorer son attitude et son courage au combat.
Alleman à Béthune
Il est démobilisé le 4 mars 1919 et épouse Marie Lafon dont le frère est ingénieur à la Compagnie des Mines de Marles. Ses neveux André et Pierre Lafon se souviennent d’un oncle rêveur et distrait. L’étude de son œuvre démontre qu’en plus des qualités inhérentes à l’artiste, il a fait preuve d’une science aiguë de la technique et de l’organisation des chantiers ainsi que d’une capacité de travail et de créativité étonnantes.
Les régions dévastées attendent et attirent les architectes. Il convient de déblayer, d’établir les plans ordonnés par la loi Cornudet, plans d’aménagement, d’embellissement, d’extension, permettant aux communes de bénéficier des dommages de guerre. Pour les particuliers il est nécessaire d’établir un dossier comprenant un plan et une valeur en 1914 des immeubles détruits ou endommagés et éventuellement de calculer une indemnité de réemploi en cas de reconstruction ou de réparation. Enfin il faut reconstruire. Il y a beaucoup de travail pour les architectes.
Jacques Alleman s’installe donc à Béthune. Il rencontre ses confrères DPLG, agréés des communes : Bocsanyi, Capelle, Gillon, Guthmann, Reynaut. Avec eux il ouvre un premier cabinet au « château du Perroy ».
En 1921 il ouvre un nouveau cabinet avec Gillon et Guthmann, place Marmottan à Béthune.
A l’époque, toutes les communes dévastées font appel à Louis-Marie Cordonnier le grand architecte vénéré, aussi bien dans la région, qu’au plan national et international, pour s’atteler à la reconstruction de leur cité.
C’est le cas de Béthune. Le maire Jules Senis est un fervent admirateur de Cordonnier et souhaite lui confier le rôle de coordonner les opérations et la reconstruction de l’église et de l’hôtel de ville.
Alleman considère avec beaucoup de respect Cordonnier ce chantre du régionalisme. Cette école recommande de construire avec le style et les matériaux de la région.
Le rôle de L.M. Cordonnier sera très important. Il conseille, il supervise. Il a un grand sens de l’organisation. Il va tenir un colloque pour inciter les autorités, les sinistrés, les architectes, les entrepreneurs à créer des sociétés coopératives de reconstruction par quartier. Un architecte référent sera chargé d’un secteur. Ces sociétés auront pour mission de régler différents problèmes afférents aux opérations de reconstruction : remembrement, financement, établissement des dossiers de dommages de guerre, coordination avec les différentes entreprises, établissement des projets de construction en relation étroite avec chacun des sinistrés. Un consortium des architectes permettra d’échanger et de créer une unité de vue de l’ensemble de la reconstruction.
Alleman et la Commission d’Esthétique.
Cordonnier préside la Commission d’Esthétique et va charger Gillon d’établir un plan d’ensemble de la Grand-Place et de ses abords. Gillon va laisser à Jacques Alleman le soin de faire le travail.
Avec une grande clarté, beaucoup d’enthousiasme Alleman va s’atteler à la tâche. Il va rendre sa copie. Après avoir examiné les caractéristiques de diverses places, sans oublier sa place de la Bourse à Bordeaux, il conclut : la place est un théâtre, c’est le cœur de la ville, là où les Béthunois et les visiteurs se rencontrent, là où se tiennent les marchés, les foires. Les immeubles des commerçants qui entourent la place doivent avoir des pignons qui cachent les toitures. Ces pignons doivent être décorés. Il insiste sur l’importance des balcons, des bow-windows et des saillies. Il recommande d’être à l’écoute des sinistrés qui doivent collaborer à la reconstruction de leur immeuble.
Pour Alleman, la place est un théâtre dont les pignons à redents et les pignons chantournés constituent le décor. Les architectes vont bien entendre ce message. Chacun va se voir attribuer un secteur et pourra, sur cette base, exprimer son style et ses talents.
Alleman adopte le régionalisme mais propose l’audace, la décoration, un art que l’on va appeler « Art Déco ». Il se réserve d’agrémenter à sa façon et avec beaucoup de liberté ses constructions.
Il est désigné pour la reconstruction du secteur allant de la rue Grosse tête à la partie de la Grand-Place jusqu’aux ruines de l’hôtel de ville.
Les constructions dans le secteur confié à Alleman
C’est alors que jaillissent sur la Grand-Place ces constructions aux pignons et aux balcons agrémentés de ferronneries et décorés de fresques dessinées avec grand soin. Jacques Alleman se soumet à l’obligation de respecter l’étroitesse des parcelles. Il travaille avec chaque sinistré propriétaire le plan de l’immeuble et les fresques parfois personnalisées.
Il parvient à donner à cette partie de la Grand-Place une extrême élégance que la sveltesse de certaines façades rend encore plus remarquable.
Dans son écriture architecturale, Jacques Alleman insiste sur l’importance des balcons, des bow-windows et des saillies
Il est surprenant de constater la variété des styles des divers immeubles construits par Alleman ;
L’immeuble Okaldi (ancienne librairie Fournier puis Pouillard-Logier et Daquin) va être remarqué lors du salon de 1925 qui officialise l’art-déco.
Ses lourdes colonnes, agrémentées de pommes de pin, qui encadrent l’entrée du magasin, sa tourelle surmontée d’un remarquable oiseau sorti de l’imagination de l’artiste, les petites pierres sculptées aux motifs ésotériques ont séduit et continuent à nous étonner, à nous charmer.
Immeuble Armand Thierry
L’immeuble Armand Thierry (anciennement Marchand puis ‘Thierry-Aine) qui a subi les outrages de travaux curieusement acceptés le défigurant, avait autrefois grande allure avec ses larges vitrines d’exposition du rez-de chaussée et du premier étage, avec son double escalier, avec les fenêtres de l’étage supérieur intégrées dans la toiture et son large balcon. Les derniers progrès en matière de confort y étaient réunis, un ascenseur desservant même les étages.
L’immeuble d’Alfred Charpentier, situé Avenue de Bruay, aujourd’hui presque complètement disparu, était une vaste bâtisse au confort moderne pour l’époque avec ses dépendances dont nous gardons la description dans l’article paru dans le journal « la Construction moderne » du 8 octobre 1927.
L’immeuble situé au coin de la rue Grosse tête et de la Grand-Place est construit sur un terrain très exigu.
Son style particulier et sa remarquable toiture s’allient néanmoins avec harmonie aux différents immeubles voisins.
Les plans de ces immeubles ont été analysés dans la revue «L’Architecture» du 15 avril 1933 qui ne manque pas d’exprimer l’admiration des spécialistes.
Le monument aux morts.
Comme dans toutes les communes la ville de Béthune souhaite édifier un monument aux morts. Le terrain est trouvé à l’angle de la rue Gambetta et de la rue Louis Blanc. Un concours est organisé. Jacques Alleman en est le lauréat avec le sculpteur Edgard Boudry. (Il en sera de même pour le monument aux morts de Lille). L’inauguration aura lieu en 1927. Le monument porte l’inscription « Aux morts Béthunois ».
En 1930, Me Boudry, conseiller municipal, demande que cette inscription soit modifiée. C’est ainsi que le monument portera la mention « aux morts pour la Patrie ».
L’Hôtel de Ville.
L’histoire de la reconstruction de l’Hôtel de Ville de Béthune est un feuilleton qui va se dérouler durant plusieurs années. En résumé, sous la Municipalité de Senis, Cordonnier est désigné pour cette tâche. Ses projets sont acceptés puis refusés. Un concours est alors organisé par le nouveau conseil municipal présidé par le maire Ponelle en 1925. Jacques Alleman ne se verra pas accorder de prix, mais une simple prime spéciale. En définitive, après divers cheminements Alleman se voit en définitive confier la reconstruction avec son ami Edgard Boutry. Son projet est la suite logique des autres constructions nouvelles qui entourent l’Hôtel de Ville qui en devient le grand frère.
Le vaste balcon qui s’avance sur la place avec sa rampe en fer forgé, les colonnes qui portent les statues des deux sauvages, le pignon décoré des armes de la Ville et des décorations reçues et, tout en haut, la lanterne, font de ce monument un digne pendant de son ami et voisin le vénérable Beffroi.
L’intérieur de l’édifice avec l’escalier d’honneur, les vitraux, la verrière qui éclaire le double escalier permettant d’accéder à la salle monumentale du Conseil, les ferronneries, les mosaïques, est un chef d’œuvre de l’Art Déco.
La décoration et les signes de la Franc-Maçonnerie.
Alleman y ajoute comme dans la plus part de ses construction des signes de la Franc-Maçonnerie : le soleil et ses rayons, l’étoile et les astres, le navire qui décore la salle du Conseil, les cordes qui s’entrelacent, des cercles, des points, l’acacia et curieusement la coquille saint-jacques détourné du sens religieux mais qui rappelle le pèlerinage, le chemin, l’initiation pour parvenir à la vérité.
Motifs Franc-Maçon
En 1940 Jacques Alleman va rejoindre sa ville natale de Bordeaux. Il reviendra à la Libération à Auchel. Tombé malade, il décédera à l’Hôpital St Sauveur à Lille le 31 octobre 1945 et sera inhumé au cimetière d’Auchel (carré 19).
Qui était Jacques Alleman
Un ancien soldat traumatisé par ce qu’il a vécu, un travailleur acharné, un homme généreux, peu attiré par l’argent, souhaitant servir le bien-être de ses clients sinistrés, un pèlerin attiré par le compagnonnage, par la Franc-Maçonnerie et la religion de son enfance, en tous cas un artiste sensible, scrupuleux, consciencieux et recherchant toujours la perfection.
Voilà le modeste hommage rendu à un homme qui, par son talent, son enthousiasme et son travail a laissé à Béthune en héritage un trésor architectural qui mérite d’être admiré et respecté.
André Delhaye
Bibliographie.
Le journal « L’Architecture » du 15 avril 1933.
Mémoire d’Émilie Picavet.
Le journal « La Construction Moderne » du 9 octobre 1927.
Les archives municipales et les délibérations du Conseil Municipal de Béthune.